Mon Combat

ADOLF HITLER

 

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Propagande et organisation

 

L'année 1921 eut, pour moi et pour le mouvement, à plusieurs points de vue, une signification particulière.

Après mon entrée dans le parti ouvrier allemand, j'entrepris aussitôt la direction de la propagande. Je tenais alors cette branche pour de beaucoup la plus importante. Il s'agissait d'abord beaucoup moins de se casser la tête au sujet de questions d'organisation que de propager l'idée même chez un plus grand nombre d'hommes. La propagande devait précéder de beaucoup l'organisation et gagner d'abord à celle-ci le matériel humain à malaxer. Aussi suis-je l'ennemi d'une organisation trop rapide et trop pédante. De cela, il ne sort souvent qu'un mécanisme mort et rarement une organisation vivante. Car une organisation est redevable de son existence à une vie organique, à un développement organique. Des idées qui ont atteint un nombre déterminé d'hommes tendront toujours à un certain ordre, et, de cet aspect intérieur, il résulte une très grande valeur. Mais ici aussi il faut compter avec la faiblesse des hommes, qui incite l'individu isolé à se cabrer instinctivement su moins au début, contre une autorité. De même, quand une organisation se développe mécaniquement de haut en bas, le grand danger consiste en ceci : une personnalité qui s'est un jour fait connaître, pas encore exactement adaptée ni même suffisamment capable, essaiera, à l'intérieur du mouvement, d'empêcher par jalousie l'ascension d'éléments plus capables. Le dommage qui résultera d'une pareille éventualité peut, principalement dans le cas d'un mouvement jeune, devenir désastreux.

C'est pour cette raison qu'il est préférable de répandre par la propagande, pendant un certain temps, une idée

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d'abord d'un point central, et ensuite de rechercher soigneusement parmi le matériel humain qui a grossi peu à peu des « têtes de Führer » et de les éprouver. Il peut arriver, quelquefois, que des hommes, insignifiants en eux-mêmes, soient néanmoins considérés comme des Führer nés. Il serait d'ailleurs tout à fait faux de vouloir voir dans la richesse des connaissances théoriques des preuves caractéristiques d'aptitude à être un Führer.

Le contraire se produit très fréquemment.

Les grands théoriciens sont très rarement aussi de grands organisateurs, vu que la grandeur du théoricien et du fabricant de programme réside en première ligne dans la connaissance et l'établissement de lois justes au point de vue abstrait, alors que l'organisateur doit être en première ligne un psychologue, doit prendre l'homme comme il est, et, pour cela, le connaître. Il doit le surestimer aussi peu que le sous-estimer. Il doit, au contraire, essayer de tenir compte de la faiblesse et de la bestialité pour créer un organisme vivant, d'une vigueur inébranlable, parfaitement approprié à propager une idée et à lui ouvrir le chemin du succès.

Mais c'est encore plus rare qu'un grand théoricien soit un grand Führer. Tel sera beaucoup plus souvent l'agitateur, ce dont beaucoup de gens d'esprit scientifique ne veulent pas volontiers convenir et, cependant, c'est compréhensible. Un agitateur qui prouve la capacité de répandre une idée dans les masses, doit toujours être un psychologue, même s'il n'est qu'un démagogue. Il sera toujours un meilleur Führer que le théoricien méditant loin des hommes et loin du monde. Car conduire signifie pouvoir remuer ties masses. Le don de former des idées n'a rien à voir avec la capacité d'un Führer. Il est tout à fait inutile de discuter pour savoir ce qui a une plus grande signification : de concevoir des idéals et des buts d'humanité, ou de les réaliser. Il en est de cela comme si souvent dans la vie : l'un serait complètement stupide sans l'autre. La plus belle conception théorique reste sans but et sans valeur si le Führer ne peut mettre les masses en mouvement vers elle. Et, inversement, que serait toute « génialité » et tout élan de Führer, si un théoricien intelligent ne déterminait ses buts pour la lutte humaine ? Mais la réunion du théoricien, de l'organisateur et du Führer en une seule personne est

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la plus rare qu'on puisse trouver sur cette terre : cette réunion produit le grand homme.

Comme je l'ai déjà fait remarquer, je me suis consacré à la propagande durant les premiers temps de mon activité dans le parti. Il lui fallait réussir à imprégner peu à peu un petit noyau d'hommes de la nouvelle doctrine, pour former le matériel qui, plus tard, pourrait former les premiers éléments d'une organisation. C'est ainsi que le but de la propagande dépassa généralement celui de l'organisation.

Si un mouvement a l'intention de bouleverser un monde et d'en construire un nouveau à sa place, une clarté intégrale doit régner au sein même de la direction d'après les principes suivants : chaque mouvement qui aura gagné du matériel humain devra d'abord le partager en deux groupes : les partisans et les membres.

 Le devoir de la propagande est de recruter des partisans ; celui de l'organisation est de gagner des membres.

Le partisan d'un mouvement est celui qui se déclare d'accord sur ses buts ; le membre, celui qui combat pour lui. Le partisan sera amené au mouvement par la propagande.

Le membre sera contraint par l'organisation d'agir lui-même pour le recrutement de nouveaux partisans, du nombre desquels de nouveaux membres pourront ensuite se former. « Etre partisan » exige seulement la reconnaissance passive d'une idée ; « être membre » exige qu'on la représente activement et qu'on la défende ; sur dix partisans, on aura à peine deux membres. Etre partisan implique un simple effort de connaissance ; pour être membre, il faut avoir le courage de représenter l'idée reconnue vraie et de la répandre largement.

En raison de sa forme passive, le simple effort de connaissance convient à la majorité des hommes, qui sont paresseux et lâches. Etre membre exige une activité de pensée qui ne convient qu'à une minorité.

La propagande doit, à cause de cela, porter ses soins sans cesse sur cette vérité qu'une idée gagne des partisans, et qu'ensuite l'organisation doit être très soigneusement attentive à chercher des membres parmi les plus capables d'entre les partisans. A cause de cela, la propagande n'a pas besoin de se casser la tête au sujet de l'importance, en particulier, de chacun de ceux qu'elle a convertis, au sujet de leur capacité, de leur savoir, de leur intelligence ou de

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leur caractère, tandis que l'organisation doit extraire très soigneusement de ces éléments ceux qui rendront réellement la possible du victoire du mouvement.

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La propagande essaie de faire pénétrer une doctrine dans le peuple entier, l'organisation n'englobe dans son cadre que ceux qui, pour des raisons psychologiques, ne pourront nuire à l'expansion de l'idée.

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La propagande inculque une idée à la masse, pour l'y préparer à l'heure de la victoire, tandis que l'organisation combat pour la victoire grâce à un faisceau permanent, organique et prêt au combat, de ceux de ses partisans qui paraissent capables et décidés à mener la bataille pour la victoire.

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La victoire d'une idée sera d'autant plus facile que la propagande aura travaillé l'ensemble des hommes sur la plus grande échelle, et que l'organisation - qui doit pratiquement conduire le combat - sera plus exclusive, plus forte et plus solide.

Il s'ensuit que le nombre des partisans n'est jamais assez grand, tandis que le nombre des membres est plus facilement trop grand que trop petit.

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Quand la propagande a rempli un peuple entier d'une idée, l'organisation peut en tirer les conséquences avec une simple poignée d'hommes. Propagande et organisation, donc partisans et membres, se trouvent d'après cela dans une position mutuelle définie. Mieux la propagande aura travaillé, plus les membres effectifs pourront être restreints ; plus le nombre des partisans sera grand, plus le nombre des membres pourra être petit, et, inversement : plus la propagande sera défectueuse, plus doit être importante l'organisation ; plus la troupe de partisans d'un mouvement reste faible, plus le nombre des membres doit être grand, s'il veut encore compter sur le succès.

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Le premier devoir de la propagande est de gagner des hommes pour l'organisation ultérieure : le premier devoir de l'organisation est de gagner des hommes pour la continuation de la propagande. Le second devoir de la propagande est de désagréger l'état de choses actuel et de le faire pénétrer par la nouvelle doctrine, tandis que le devoir de l'organisation doit être le combat pour la puissance, pour faire définitivement triompher la doctrine.

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Un succès décisif, dans une révolution, sera toujours atteint, si une nouvelle conception du monde est enseignée à tout le peuple, voire même imposée en cas de nécessité, et que, d'autre part, l'organisation centrale - donc le mouvement - englobe seulement le minimum d'hommes absolument indispensables pour occuper le centre nerveux de l'Etat.

Autrement dit :

Dans tout mouvement réellement grandiose, è allure de bouleversement mondial, la propagande doit d'abord répandre l'idée de ce mouvement. Infatigablement, elle devra chercher à rendre claires Ies nouvelles idées, à les inculquer à la foule, ou tout au moins à ébranler ses anciennes convictions. Vu qu'une telle propagande doit posséder une « colonne vertébrale », la doctrine devra être étayée sur une solide organisation. L'organisation choisit ses membres parmi ceux de ses partisans qui ont été gagnés par la propagande. Cette organisation croîtra d'autant plus vite que la propagande sera poussée plus intensément, et cette propagande pourra d'autant mieux travailler que l'organisation qui est derrière elle sera plus forte et plus puissante.

Le suprême devoir de l'organisation consiste à prendre soin que les désunions, en quelque sorte intérieures, parmi les membres du mouvement, ne conduisent pas à des ruptures, et, par suite, à l'affaiblissement du travail dans le mouvement ; ensuite que l'esprit d'attaque ne meure pas, mais se renouvelle et se fortifie de plus en plus. Le nombre des membres n'a pas besoin, d'après cela, de croître sana fin, au contraire : seule une élite restreinte peut être énergique et audacieuse ; un mouvement dont l'organisation

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s'accroîtrait sans fin, s'affaiblirait un jour, forcément, à cause de cela. Des organisations trop pléthoriques perdent peu à peu leur combativité et ne sont plus capables de soutenir avec résolution et esprit d'offensive la propagation de l'idée.

Plus une idée est riche et fertile en ferments révolutionnaires, plus ses propagateurs doivent être actifs, vu que la force subversive d'une telle doctrine risque d'en éloigner les petits bourgeois lâches. Ils pourront, dans leur for intérieur, se sentir des partisans, mais refuseront de le reconnaître ouvertement.

C'est pourquoi l'organisation d'une idée réellement révolutionnaire ne prend comme membres que les plus actifs partisans. C'est dans cette activité, cautionnée par un choix naturel, que réside la condition d'une propagande ultérieure du mouvement, aussi bien qu'un combat victorieux pour la réalisation de l'idée.

Le plus grand danger qui puisse menacer un mouvement est la croissance anormale du nombre de membres par suite d'un trop rapide succès. Un mouvement, tant qu'il a à combattre rudement, est évité par tous les êtres lâches et foncièrement égoïstes, mais ceux-ci cherchent vite à acquérir la qualité de membres, si le parti, par son développement, affirme son succès.

C'est à cela qu'il faut attribuer que beaucoup de mouvements victorieux restent soudain en arrière, avant le succès définitif, avant l'ultime achèvement de ses buts, et, pris d'une faiblesse interne, cessent le combat et s'étiolent. A la suite de sa première victoire, il s'est introduit dans son organisation tellement d'éléments mauvais, indignes et particulièrement lâches, que ces lâches-là ont finalement la majorité et étouffent les combatifs. Ils détournent le mouvement au service de leurs propres intérêts, l'abaissent au niveau de leur propre héroïsme mesquin et ne font rien pour achever la victoire de l'idée originelle. Le fanatisme s'amollit alors, la force combative est paralysée, ou, comme le monde bourgeois a coutume de dire très justement en pareil cas : n Ce parti a mis de l'eau dans son vin u. Et tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Aussi est-il indispensable qu'un mouvement, de par la nécessité de sa propre conservation, se ferme à la foule dès que le succès s'est rangé de son côté, et qu'à l'avenir il

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procède à l'accroissement de son organisation avec une précaution infinie et un examen approfondi. C'est seulement ainsi que le mouvement pourra conserver son noyau intact, frais et sain. Il faut prendre soin que ce soit exclusivement ce noyau qui conduise le mouvement, c'est-à-dire entreprenne, en tant que détenteur de la puissance, les actes indispensables pour la réalisation pratique de l'idée. Se basant sur les idées fondamentales et originelles du mouvement, l'organisation a le devoir, non seulement de consolider toutes les positions importantes, conquises dans le plan doctrinal, mais aussi de constituer un organisme central de direction. Et ceci jusqu'à ce que les principes actuels et les enseignements du parti soient devenus le fondement et l'essence même du nouvel Etat. C'esta lors seulement que la constitution propre de cet Etat, issue de l'esprit du parti, pourra s'élaborer librement, au prix d'une lutte intestine. En effet il s'agit moins de points de vue purement humains que du libre jeu et de l'action de forces, sans doute prévisibles, mais d'un effet difficilement contrôlable pour l'avenir.

Tous les grands mouvements, qu'ils soient de nature religieux ou politique, ne doivent leurs puissants succès qu'à la connaissance et à l'emploi de ces principes. Tout succès durable ri est pas concevable sans l'observance de ces lois.

En tant que directeur de la propagande du parti, je me suis efforcé, non seulement de préparer le terrain pour le mouvement ultérieur, mais encore, avec une rigueur absolue, j'ai agi pour que l'organisation ne prenne que des éléments de valeur. Plus j'ai été dur et plus j'ai manié le fouet, plus ma propagande effrayait, écartait les faibles et les natures hésitantes, empêchait leur entrée dans le premier noyau de notre organisation. Ils sont peut-être restés des partisans et, dans ce cas, n'élèvent pas la voix, restant, au contrai. ~, dans un silence anxieux. Combien de milliers ne m'ont-ils pas assuré autrefois qu'ils étaient complètement d'accord en tout, mais que, néanmoins, dans aucune circonstance, ils ne pouvaient être membres. Le mouvement était si violent, disaient-ils, qu'une coopération comme membres les exposerait à des conflits particuliers très aigus,

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même à des dangers, mais qu'on ne pouvait faire grief à un bourgeois honnête et paisible de se tenir pour le moment s l'écart, puisqu'il appartenait complètement de cœur à la cause.

Et cela était bien ainsi.

Si ces hommes qui, intérieurement, n'étaient pas partisans de moyens révolutionnaires extrêmes, étaient venus alors dans notre parti, comme membres, nous aurions pu noua considérer comme une pieuse congrégation, mais certainement pas comme un mouvement jeune et joyeux de combattre.

La forme vivante et combative que je donnai alors à notre propagande a fortifié et garanti la tendance extrémiste de notre mouvement, vu que, seuls, les hommes réellement extrémistes - à quelques exceptions pr8s - étaient prêts à coopérer avec moi comme membres.

Ainsi conçue, ma propagande a eu un effet tel qu'en un court laps de temps, des centaines de milliers d'hommes nous donnaient raison intérieurement et souhaitaient notre victoire, s'ils étaient personnellement trop lâches pour faire des sacri6ces à la cause et y participer.

Jusqu'au milieu de 1921, notre action, purement dirigée vers le recrutement, pouvait encore suf6re et être utile au mouvement. Des événements particuliers à la fin de l'été de cette année-là firent apparaître opportun d'adapter l'organisation su succès patient de la propagande.

La tentative d'un groupe de racistes visionnaires, sous l'égide éminemment agissante du président du parti, alors en exercice, de s'emparer de la direction du mouvement, conduisit à l'effondrement de cette petite intrigue et me donna, à l'unanimité, dans une assemblée générale des membres, la direction d'ensemble du mouvement.

En même temps, fut décidée l'acceptation d'un nouveau statut qui délégua au premier président du mouvement la pleine responsabilité, qui abrogea les décisions du bureau et, à la place de celles-ci, introduisit un système de division du travail qui s'est montré, depuis, tout à fait efficace.

Depuis le 1er août 1921, j'ai entrepris cette réorganisation intérieure du mouvement et j'ai trouvé le concours d'une pléiade d'âmes d'élite ; j'estime nécessaire de les mentionner dans un chapitre spécial.

Pour donner, au point de vue de l'organisation, quelque

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valeur aux résultats de la propagande et les établir solidement, je dus faire table rase d'une série d'habitudes prises jusque-là et apporter, dès le début, des principes que ne possédait aucun des partis existants ou qu'aucun n'avait adoptés.

Dans les années 1919 et 1920, le mouvement avait eu pour direction un Comité choisi par les assemblées des membres. Le Comité comprenait un premier et un second trésorier, un premier et un second secrétaire et, comme têtes, un premier et un second président. A cela s'ajoutèrent encore un comité de membres, le chef de la propagande et différents assesseurs.

Ce Comité personnifiait proprement - si comique que cela pût être - ce que le mouvement même voulait combattre de la façon la plus âpre, à savoir le parlementarisme. Car il s'agissait là dedans d'un principe qui personnifiait tout à fait le système depuis le plus petit hameau jusqu'aux futurs arrondissements, provinces, Etats, jusqu'au gouvernement, système sous lequel nous souffrions tous.

Il était absolument indispensable de procéder à un changement, si on ne voulait pas que le mouvement, par suite des mauvaises bases d'organisation intérieure, se corrompît pour toujours et fût incapable d'accomplir un jour sa haute mission.

Les séances du Comité, qui étaient régies par un protocole, et dans lesquelles on votait à la majorité et prenait des décisions, représentaient en réalité un petit Parlement. La valeur personnelle et la responsabilité y manquaient. Il y régnait le même contresens et la même déraison que dans nos grands corps représentatifs de l'Etat. On nommait pour ce Comité des secrétaires, des hommes pour tenir la caisse, des hommes pour former les membres de 1'organisation, des hommes pour la propagande et Dieu sait encore pour quoi, et ensuite tous devaient prendre position en commun pour chaque question particulière et décider par vote. Ainsi l'homme qui était chargé de la propagande votait sur un sujet concernant les finances ; le trésorier votait sur l'organisation ; l'organisateur votait sur un sujet ne concernant que les secrétaires, etc.

Pourquoi désignait-on un homme pour la propagande, puisque les caissiers, les scribes, les commissaires, etc., avaient à juger les questions la concernant ? Cela paraît à

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un cerveau sain aussi incompréhensible que si, dans une grande entreprise industrielle, les gérants avaient à décider sur la technique de la production, ou si, inversement, les ingénieurs avaient à juger des questions administratives.

Je ne me suis pas soumis à cette insanité, mais, après fort peu de temps, je me suis éloigné des séances. Je faisais ma propagande et cela suffisait. J'interdisais, en général, que le premier incapable venu essaie d'intervenir sur le terrain qui m'était propre. De même que moi, réciproquement, je me gardais d'intervenir dans les affaires des autres.

Lorsque l'acceptation des nouveaux statuts et mon appel au poste de premier président m'eurent, entre temps, donné l'autorité nécessaire et le droit correspondant, cette insanité cessa immédiatement. A la place des décisions du Comité, fut admis le principe de ma responsabilité absolue.

Le premier président est responsable pour la conduite d'ensemble du mouvement. Il répartit les forces du Comité qui sont sous sa direction, aussi bien que les collaborateurs indispensables pour le travail à fournir. Chacun de ces messieurs est responsable, irrévocablement, des tâchas dont il a été chargé. Il n'est subordonné qu'au premier président, qui doit prendre soin de l'action commune de tous, relativement au choix des personnes et à l'élaboration des directives communes que le travail en commun nécessite.

Cette nécessité d'une responsabilité absolue est peu à peu devenue l'évidence même au sein du mouvement, du moins pour la conduite du parti. Dans les petits hameaux et peut-être aussi encore dans les cantons et les districts, il s'écoulera encore longtemps jusqu'à ce que ces principes s'imposent, vu que, naturellement, les « cœurs en peau de lapin » et les incapables s'en détendront toujours : pour eux, la responsabilité unique pour une entreprise sera toujours désagréable ; ils se sentent toujours plus libres et plus à leur aise si, pour chaque décision importante, ils sont couverts par la majorité d'un soi-disant comité. Mais il me parut indispensable de prendre position avec une violence extraordinaire contre une telle habitude, de ne faire aucune concession à la crainte des responsabilités, et de viser à une conception du devoir et du savoir d'un Führer, devant amener au poste de Führer exclusivement l'homme digne de l'occuper.

Mais un mouvement qui veut combattre la stupidité

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parlementaire doit d'abord être libéré de celle-ci. C'est seulement sur une telle base qu'il peut devenir fort pour lutter.

Un mouvement qui, à une époque de domination de la majorité, repose fondamentalement sur le principe de la pensée du Führer et de sa responsabilité, culbutera un jour avec une certitude mathématique la situation jusqu'alors existante et sera victorieux.

Cette idée amena à l'intérieur dia. mouvement une complète réorganisation. Et dans son achèvement logique, elle conduisit aussi à une séparation très nette de l'action économique du mouvement et de la conduite politique générale. La pensée de la responsabilité fut, par principe, également étendue à l'ensemble des actions du parti et les rendit efficaces en libérant de toute influence politique les questions économiques et inversement.

Lorsque, à l'automne 1919, j'entrai au parti alors composé de six hommes, celui-ci ne possédait ni permanence ni employé, ni formulaire, ni sceau, ni papier imprimé. Le siège du Comité n'était alors qu'une auberge dans la Herrengasse et, plus tard, un café Am Gasteig. C'était une situation impossible. ;e me mis alors peu de temps après en campagne et explorai un nombre important de restaurants et d'auberges dans Munich, dans l'intention de louer une salle spéciale ou un local quelconque pour le parti. Dans l'ancienne brasserie Sternecker, im Tal (1), se trouvait une petite salle voûtée qui jadis avait servi de taverne aux conseillers du Saint-Empire en Bavière. Elle était sombre et obscure et, de ce fait, était aussi parfaitement adaptée à son ancienne destination qu'elle l'était. peu au nouvel emploi qui lui était réservé. La petite ruelle, sur laquelle ouvrait son unique fenêtre, était si étroite que, même pendant les jours les plus lumineux de l'été, la chambre restait sombre et lugubre. Cela devint notre première permanence. Comme la location mensuelle ne s'élevait qu'â cinquante marks (c'était alors pour nous une somme fabuleuse), nous ne pouvions avoir de grandes exigences, nous ne pouvions même pas nous plaindre de ce qu'avant notre arrivée on eût enlevé rapidement les boiseries murales datant des conseillers, de sorte que le local finissait par donner plutôt l'impression d'un tombeau que d'un bureau.

(1) Rue de Munich.

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Et cela était déjà cependant un immense progrès. Peu à peu nous acquîmes la lumière électrique, plus tard un téléphone : vint ensuite une table, avec quelques chaises empruntées, enfin une étagère, un peu plus tard encore, une armoire ; deux buffets, qui appartenaient à notre hôtelier, devaient servir pour conserver des tracts, des affiches, etc.

Le système pratiqué jusqu'alors, consistant à diriger le mouvement par une seule séance du Comité par semaine, ne pouvait durer. Il fallut un employé, payé par le parti, pour assurer l'exécution des affaires courantes.

Ce fut alors très difficile. Le mouvement avait encore si peu de membres que ce fut tout un art de découvrir parmi eux un homme approprié qui pût, avec des exigences personnelles minimes, satisfaire les exigences variées du mouvement.

Ce fut en un soldat, un de mes anciens camarades, Schüssler, qu'on trouva, après de longues recherches, le premier secrétaire du parti. Il vint d'abord chaque jour de 6 à 8 heures dans notre nouveau bureau, plus tard de 5 à 8, enfin chaque après-midi ; et, peu de temps après, il fut occupé à plein et accomplit alors son service depuis le matin jusque tard dans la nuit. II était aussi appliqué que loyal et foncièrement honnête : il se donnait toute la peine possible et était fidèlement attaché au mouvement. Schüssler apportait avec lui une petite machine à écrire Adler qui était sa propriété. Ce fut le premier de ces instruments au service de notre mouvement. Elle fut plus tard acquise par le parti grâce aux cotisations. Un petit coffre-fort parut être indispensable pour mettre à l'abri des voleurs les dossiers et les livrets individuels des membres. Cette acquisition n'avait pas pour but d'y déposer les grosses sommes d'argent que nous aurions pu posséder. Au contraire, nous étions in6niment pauvres et j'ai souvent ajouté mes petites économies.

Un an et demi plus tard, la permanence devint trop petite et il en résulta un déménagement dans un nouveau local, Corneliusstrasse. C'était encore une auberge ; ici, nous ne possédions plus seulement une pièce, mais déjà trois, et une grande salle avec guichet. Cela nous paraissait déjà bien beau. Nous y restâmes jusqu'à novembre 1923.

En décembre 1920 se produisit l'acquisition du Völkischer

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BearBachter. Ce journal, qui, comme l'annonce déjà son nom, soutenait en général les desiderata racistes, fut transformé en organe du nouveau parti national-socialiste. Il parut d'abord deux fois par semaine, devint quotidien au commencement de 1923 et reçut, fin août 1923, son grand format.

Je dus alors, complètement novice dans le domaine journalistique, payer maintes fois pour mon apprentissage, ce qui me parut abominable.

En soi, un fait devait donner à réfléchir, c'est qu'il ri y avait qu'un seul journal raciste réellement important en face de l'immense presse juive. La cause en est, comme j'ai pu le constater moi-même un nombre incalculable de fois dans la pratique, que, pour une très grande part, il n'y a que peu de débouchés commerciaux pour les entreprises racistes. Elles étaient conduites beaucoup trop d'après ce point de vue que le sentiment devait avoir le pas sur l'action. Point de vue tout à fait faux, en ce sens que le sentiment ne doit rien avoir d'extérieur, mais, au contraire, doit trouver sa meilleure expression dans l'action. Celui qui peut accomplir des actions de valeur pour son peuple, montre par là un sentiment réellement plein de valeur, tandis que tel autre, qui se borne à simuler le sentiment, sans rendre en réalité des services utiles à son peuple, est un homme néfaste qui pervertit la communauté par ses sentiments néfastes.

Ainsi le Völkische Beobachter, comme déjà l'indique son nom, était un organe raciste, avec tous les avantages, et encore plus avec les défauts et les faiblesses inhérents aux institutions racistes. Autant son contenu était honnête, autant l'administration de l'entreprise était impossible commercialement. Sa rédaction croyait dur comme fer que des journaux racistes ne devaient recevoir que des oboles racistes, alors que le journal aurait dû, au contraire, se frayer un chemin par la concurrence avec les autres. C'est une inconvenance de vouloir couvrir les négligences ou les fautes de la conduite commerciale de l'entreprise par les oboles des patriotes bien pensants. Je me suis efforcé, en tous cas, de modifier cette situation dont j'avais reconnu tout de suite la gravité, et la chance m'aida en ce sens que je fis la connaissance de l'homme qui a rendu infiniment de services su mouvement depuis ce temps-là, non seulement

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comme directeur commercial du journal, mais aussi comme chef commercial du parti.

C'est en 1914, donc en campagne, que je connus - il était alors mon supérieur - le chef commercial actuel du parti, Max Amann. Dans les quatre années de guerre, j'eus l'occasion, presque constamment, d'observer les capacités extraordinaires, l'application et la conscience scrupuleuse de mon futur collaborateur.

Dans l'arrière-saison de l'été 1921, alors que le mouvement traversait une crise difficile et qu'un certain nombre d'employés ne me donnaient plus satisfaction, et que je faisais même avec l'un, en particulier, l'expérience la plus amère, je me tournai vers mon ancien camarade de régiment, que le hasard conduisit un jour à moi, en le priant de devenir le chef commercial du mouvement. Après de longues hésitations - Amann se trouvait alors dans une situation pleine d'avenir - il y consentit enfin, mais d'ailleurs sous la condition formelle qu'il ne ferait jamais le métier de gendarme vis-à-vis de comités quelconques et impuissants, mais, au contraire, reconnaîtrait exclusivement un maître unique. C'est le mérite ineffaçable de ce premier chef commercial du mouvement, homme de haute culture, d'avoir apporté dans les affaires du parti l'ordre et la netteté. Elles sont restées en exemple et leur qualité ne put jamais être égalée par aucune des ramifications du mouvement. Comme toujours dans la vie, une valeur supérieure éveille très fréquemment la jalousie et la haine. On devait aussi naturellement s'y attendre dans ce cas, et le subir patiemment.

Dès 1922, de rigides directives étaient en vigueur, aussi bien pour la constitution commerciale du mouvement que pour son organisation pure. Il existait déjà un répertoire central complet des dossiers englobant l'ensemble de tous les membres appartenant au mouvement. De même, on était parvenu à faire financer le mouvement. Les dépenses courantes devaient être couvertes par les recettes courantes, les recettes extraordinaires devaient être consacrées seulement aux dépenses extraordinaires. Malgré la difficulté des temps et à l'exception des petits comptes courants, le mouvement resta presque libre de dettes et même il réussit à réaliser un accroissement durable de son pécule. On travaillait comme dans une exploitation privée : le personnel

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employé avait à se signaler par ses actes et ne pouvait, en aucune façon, se targuer du titre de partisan. La réputation de chaque national-socialiste se prouvait d'abord par son empressement, par son application et son savoir-faire dans l'accomplissement de la tâche indiquée. Celui qui ne remplit pas son devoir, ne doit pas se vanter d'une réputation surfaite. Le nouveau chef commercial du parti affirma, malgré toutes les influences possibles, avec la dernière énergie, que les affaires du parti ne devaient pas être une sinécure pour des partisans ou des membres peu zélés. Un mouvement qui, sous une forme aussi aiguë, combat la corruption propre aux partis dans notre système administratif, doit être exempt de vices. Il se produisit encore le cas que, dans l'administration du journal, des employés qui appartenaient au « parti populaire bavarois n et avaient été engagés pour leur valeur professionnelle, se montrèrent exceptionnellement qualifiés. Le résultat de cet essai fut en général excellent. C'est précisément à cause de notre façon de reconnaître honnêtement et franchement le travail réel de chacun que le mouvement put gagner les cœurs de ces employés vite et profondément. Ils devinrent plus tard de bons nationaux-socialistes et le restèrent, non seulement de façade, mais ils le prouvèrent par le travail consciencieux, ordonné et loyal, qu'ils accomplirent dans le service du nouveau mouvement. Naturellement, un membre du parti bien qualifié était préféré à un autre aussi bien noté, mais n'appartenant pas au parti. Mais personne ne recevait un emploi par le seul motif qu'il appartenait au parti. Le vigoureux esprit de décision avec lequel le nouveau chef commercial appliqua ces principes et les fit triompher peu à peu, malgré toutes les résistances, fut plus tard pour le mouvement de la plus grande utilité. C'est seulement à cause de cela qu'il fut possible, dans les temps difficiles de l'inflation, alors que des dizaines de milliers d'entreprises s'effondraient et que des milliers de journaux devaient cesser de paraître, que la conduite commerciale du mouvement non seulement resta debout et put satisfaire à ses obligations, mais encore que le Völkische Beobachter se développa toujours davantage. Il était alors au nombre des grands journaux.

L'année 1921 fut encore importante par le fait que, grâce à ma situation de président du parti, je réussis à

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empêcher des critiques de détail et des interventions de tels ou tels membres du Comité au sujet de l'activité du parti. Et cela était important, parce que l'on ~e pouvait pas garder pour faire du bon travail une tête réellement capable, si les incapables intervenaient constamment par leurs bavardages, prétendant tout mieux comprendre, alors qu'en réalité ils laissaient derrière eux un trouble immense. D'ailleurs, ces incapables se retirèrent, la plupart tout à fait modestement, pour porter sur un autre champ d'action leur agitation, leur contrôle et leurs idées. Il y avait des hommes, possédés d'une sorte de maladie de la critique et qui se trouvaient dans une sorte d'état d'enfantement de plans, de pensées, de projets et de méthodes prétendus supérieurs. Leur but le plus idéal et le plus élevé était surtout la formation d'un comité, qui aurait eu à flairer, sous prétexte de contrôle, le travail ordonné des autres. Combien il est blessant et peu national-socialiste de voir des hommes incompétents se mêler constamment aux gens du métier, beaucoup de ces « comitards » n'en avaient pas conscience. J'ai, en tous cas, considéré comme mon devoir de protéger contre de tels éléments toutes 1es forces du mouvement ordonnées et responsables, de leur procurer un soutien indispensable et toute latitude pour le travail et la marche en avant.

Le meilleur moyen pour rendre inoffensifs ces comités qui ne faisaient rien ou qui cuisinaient des projets pratiquement irréalisables, était d'ailleurs de leur procurer un travail réel quelconque. Ce fut risible de voir comment l'assemblée s'évanouit alors sans bruit et devint subitement introuvable. Cela me faisait penser à notre plus grande institution analogue, le Reichstag. Comme ils disparaîtraient sans bruit et vite, s'ils étaient chargés d'un travail réel au lieu de fabriquer des discours, d'un travail que chacun de ces hâbleurs aurait à exécuter sous sa responsabilité personnelle !

J'ai toujours posé en axiome que - aussi bien dans la vie privée que dans notre mouvement - on devait chercher aussi longtemps qu'il le fallait jusqu'à ce que l'on trouve des fonctionnaires, des gérants ou des directeurs visiblement capables et honnêtes. Alors on devait leur donner une liberté d'action totale et une autorité sans condition sur les subordonnés, en leur attribuant une responsabilité sans

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limite vis-à-vis de leurs supérieurs ; ainsi, personne ne peut recevoir une autorité sur les subordonnés sans être d'une compétence indiscutable. En deux ans, j'ai percé, mon opinion a triomphé et, aujourd'hui, elle paraît évidente à tous dans le mouvement, du moins en de qui concerne la direction suprême.

Le succès de cette attitude s'avéra le 9 novembre 1923. Lorsque j'étais entré dans le mouvement quatre années auparavant, il n'existait même pas de sceau. Le 9 novembre 1923, eut lieu la dissolution du parti et la confiscation de ses biens. Cela se chiffrait déjà à plus de 170.000 R. M. or. y compris tous les objets de valeur et le journal.